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[Saint-Papoul] Qu'es aquò que ce cassoulet glacé ?

Version sucrée de l'illustre cassoulet de Castelnaudary, le cassoulet glacé, moins connu que sa goulue version avec saucisse, est un dessert où la cassole est faite de nougatine garnie de glace et de chantilly.

Le cassoulet glacé de Fabrice Sibra à Saint-Papoul. © Justine Bonnery

Pour découvrir cette spécialité audoise, notre pif nous a conduits dans une petite commune rurale du Lauragais de huit cents Saint-Papoulais où l'abbaye bénédictine ramène une tripotée de touristes chaque année. L'ancienne cité épiscopale est aujourd'hui un village vivant, où résident un médecin, une coiffeuse, un kiné, un épicier, un mécano... c'est peut-être un détail pour le citadin qui lit ces mots, mais dans le coin les villages sans commerces se comptent à la pelle.

Au centre-bourg, Fabrice Sibra a ouvert il y a sept ans sa boulangerie, la seule des parages. En boutique, plusieurs spécialités comme le pumpet, les croquants ou la tarte au sucre sont mitonnées chaque jour par le chef, un apprenti, un ouvrier boulanger et servies par deux vendeuses. Dans la vitrine, plusieurs cassoulets glacés trônent en attendant de régaler des panses. Sa recette, Fabrice l'a peaufinée au fil de ses expériences professionnelles, notamment à la boulangerie Fabre d'Alzonne où il était apprenti.

Le cassoulet glacé se prépare en trois étapes : d'abord la nougatine en guise de cassole, puis la glace aux haricots (c'est une blague), et la chantilly. « Certains mettent de la meringue italienne comme sur les omelettes norvégiennes à la place de la chantilly », soumet Fabrice.

La cassole

Pour réaliser la forme du récipient traditionnel en terre cuite, préparez un caramel auquel vous ajoutez des amandes. « Certains prennent des amandes hachées, d'autres effilées », explique Fabrice en préparant son caramel à base de glucose (crème transparente qui évite au caramel de cristalliser) et de fondant (crème blanche que l'on met sur les éclairs ou les mille-feuilles). Pour vous qui allez tenter de réaliser cette performance sucrée, il vous suffit de faire un caramel avec 100 g d'eau et 400 g de sucre que vous montez à 160°C, « et lorsqu'il devient brun, il faut ajouter entre 200 et 250 grammes d'amandes ». Il ne faut surtout pas remuer son caramel, cela le ferait cristalliser sur les bords.

Les amandes effilées mélangées au caramel. © Justine Bonnery

En attendant que le caramel brunisse, Fabrice s'équipe d'une plaque de cuisson qu'il couvre d'un papier sulfurisé et à l'aide d'une bombe de graisse alimentaire il enduit le tout, même la spatule. Son caramel à présent basané, Fabrice mélange. « Il ne faut pas remuer trop longtemps car le caramel continue de cuire. » Il dépose le tout sur sa plaque qu'il enfourne entre 120°C et 150°C « pour que le sucre reste chaud et ne cuise pas ». Grâce à la chaleur, Fabrice va pouvoir travailler sa nougatine et lui donner la forme de la célèbre terrine chaurienne.

La nougatine enfournée. © Justine Bonnery

Qu'on se le dise, l'opération est technique. Fabrice confirme, « le plus dur c'est le travail de la nougatine. Il faut vraiment avoir un four à proximité ». Pour la façonner, Fabrice se munit d'une plaque de marbre, d'une corne pour couper, d'une spatule pour décoller la nougatine du plan de travail, d'un couteau de tour pour découper les contours de la cassole, d'un rouleau à pâtisserie ainsi que d'un marteau en bois pour taper sur le cercle à tarte. On vous l'avait dit que c'était technique... à nouveau, graissez le tout.

Fabrice prend une part de sa nougatine qu'il rompt de sa corne, la dépose sur le marbre puis l'étale au rouleau. Diantre, la nougatine est absolument brûlante, à tel point que la corne en plastique se dissout. L'expérience oblige, Fabrice ne chigne point. D'un cercle à tarte qu'il tambourine au marteau, il trace le rond de nougatine qu'il dépose dans une vraie cassole afin qu'elle en épouse les courbes. « Si vous n'avez pas d'emporte-pièce, vous pouvez le faire avec des ciseaux ou un couteau », rassérène-t-il. « Une fois refroidi, ça ne bouge plus. Par contre ça reste très fragile », prévient Fabrice. Pour l'épaisseur de la nougatine, ne dépassez pas les 4 millimètres car « trop épais ce sera difficile à manger ».

La nougatine épouse la cassole pour en prendre les courbes. © Justine Bonnery


La garniture

Entre-temps, un Espagnol tout joyeux vient livrer la farine du moulin du Vivier de Castelnaudary. « Ici on travaille autant que possible avec du local », atteste Fabrice qui d'ailleurs arbore un tee-shirt « Un moulin familial au cœur de l'Occitanie ». Il est à présent temps de garnir la cassole de glace. Le parfum est au choix, le plus courant est tout de même la vanille ou le rhum raisin. « Parfois il y en a qui font des plombières, de la vanille avec des fruits confits. »

La cassole garnie de glace à la vanille par Fabrice Sibra. © Justine Bonnery

La croûte

Ce qui dans un cassoulet traditionnel est fait d'une croûte non sans importance, est fait ici de chantilly. Pour la réaliser, il vous faut 100 grammes de crème fraîche liquide « avec au minimum 35 % de matière grasse car plus elle est grasse mieux c'est », conseille Fabrice. Puis 15 grammes de sucre « semoule de préférence, il se mélange mieux que le sucre cristal qui est plus épais », recommande-t-il. Tout doit être froid, même le cul de poule et le fouet. L'idéal est de les mettre au congélateur avant de les utiliser.

Étalez votre chantilly sur le dessus du cassoulet et décorez-le, comme Fabrice, de copeaux de chocolat, de raisins secs, de vermicelles, d'amandes effilées, de tranches de citron ou de fraises. Et si vous vous sentez l'âme d'un bon cuisinier en trompe-l'œil, tentez de modeler une saucisse et une couenne en pâte d'amande.

« C'est un dessert que l'on vend davantage l'été. Pour Noël, je fais une bûche avec les mêmes ingrédients. » Une fois sur table, le dessert fait de l'effet. Néanmoins, accrochez-vous pour faire de jolies parts, « c'est un gâteau très difficile à servir car la nougatine se casse », confirme Fabrice. Pour l'emporter, il certifie « qu'une heure de route dans une glacière, c'est jouable ».

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